30 DE ABRIL DE 1893 – NÎMES: FIM DA PALHAÇADA DOS "FORCADOS NEGROS" (na imprensa francesa


 

Bibliothèque nationale de France


PLAZA DE TOROS

NIMES

Le premier toro porte le fer et la devise de Hernan. Puissant de forme, bien armé, châtain bruûlé, il fait une sortie vigoureuse, mais son ardeur tombve aussitôt. Pepe Hillo le salue de deux véroniques et de quelques pointes de capes (largas) auxquelles l’animal répond à peine. Trois paires de banderilles piquées par Luiz et Gonzalito ne peuvent parvenir à exciter l’ardeur morte de ce paisible ruminant. Pepe prend la muleta et, après quelques passes variées, termine par un volapié marquant une bonne estocade.


On salue d’applaudissements l’apparition de (José) Bento (de Araújo); aussitôt sort le second animal, il prend une javeline du cavalier en place, mais dédaigne bientôt son tourbillonnant adversaire pour s’attacher à la poursuite de gens à pied. (José) Bento (de Araújo) insiste, le dédain de l’animal le pousse à commettre des imprudences, et peu s’en faut que le fauve agacé ne fasse un mauvais parti à la monture. Tant mieux, nous en sommes quittes pour la peur. Gonzalito prend bravement la cape, passe trois fois l’encorné et le renvoie à Pepe-Hillo qui le reprend dans un travail de cape admirablee. Le matador s’avance ensuite la muleta à la main. Plusieurs passes naturelles, une en rond (redondo), une de poitrine (de pecho) sont les préliminaires d’une seconde estocade bien signalée (applaudissements).

Mais voici que s’avancent les Pegadores nègres, en costume de matelot, ils se tiennent dans une façon de navire en toile peinte, armés de javelines, ils attendent la sortie du toro qui ne tarde pas à paraître.

La brute d’élance contre eux, mais criblée de javelines, elle fait demi-tour et devient méfiante, c’est alors que ces vrais fantoches s’approchent de biais, l’un après l’autre, et l’animal ahuri est percé d’autres javelots.

Lorqu’il veut foncer, les caricatures se jettent à terre, et la bête dans son élan ne peut les saisir. Cette partie de la course a, pendant un moment, amusé le public; je connais deux graves sénateurs qui, malgré leurs haussements d’épaule, ne pouvaient s’empêcher de s’esclaffer de rire.

Les Pegadores reparaissent pour le quatrième toro, petit Banuelos, ils sont accueillis par de vigoureux et unanimes sifflets, Bento Leal fait un saut à la perche qui passe inaperçu; c’est alors que les nègres essaient de faire une pega; les malheureux noirs font tout ce qu’ils peuvent pour plaire. L’un d’eux appelle le toro, le saisit adroitement par les cornes et se jette entre les deux pointes, pendant que les trois autres se suspendant au cou de l’animal, cherchent à l’immobiliser. Les sifflets continuent, décidément le public n’aime pas ces jeux grossiers.

Paraît le cinquième toro, autre Banuelos, vif; il reçoit six javelines de (José) Bento (de Araújo), dont deux courtes. Pepe le passe de front par derrière (frente por detrás) et avec son frère Luis, chacun tenant un bout de cape, le capent à deux (el Alimon). Pepe prend la muleta, et après quelques passes naturelles faites en courant sur cet animal désordonné, signale encore une bonne estocade.

Voici le sixième toro, il est de Hernan, beau type d’andalou, fort et puissant, admirablement armé. Le jeu de Pepe-Hillo se révèle ici comme celui d’un bon torero, excellentes véroniques, faites avec sérénité sans mouvement des pieds, brillantes navarraises; le public froid jusqu’alors, s’anime et applaudit. Le diestro prend les banderilles, il pique d’une première paire de côté le toro près de la barrière (sesgo). Gonzalito profite du mouvement fait par la brute pour piquer au relancé. Le public commence à s’allumer; on applaudir à outrance deux autres paires de banderilles piquées au sesgo.

Pour les connaisseurs, cette façon de piquer est l’une des plus difficiles et des plus appréciées, car à ce moment le toro tient la defensive. Pepe prend la muleta, après de remarquables passes faites de près et dans les règles, il frappe son toro d’une magnifique estocade haut la main et al encuentro (à la rencontre).

Le public, enlevé, lui fait une ovation méritée.

APPRÉCIATIONS

Au point de vue de la course en elle-même, on ne peut bien juger des qualités et des défauts du bétail. Nous ne parlerons pas des toros destinés aux pegadores; ceux piqués par le cavalier en place, passent au jeu espagnol avec toutes leurs facultés. Ils portent haut, sont coureurs et désordonnés, graves défauts qui rendent même la lutte impossible parfois. Le quatrième toro, par exemple; difficile à fixer pour la muleta, prouve rigoureusement ce que nous avançons. Il doit paraître sous peu, un petit volume: Toros et Toreros, qui fera comprendre mieux que nous ne pourrions le faire, les conditions dans lesquelles doit se présenter un animal pour la difficile et dangereuse suerte de muleta. Aussi les deux toros désignés pour se servir au quadrille, ont-ils été de bdeaucoup mieux travaillés, malgré que le premier fut de tempérament peu batailleur! Le sixième toro, de belle encolure, admirablement armé et de poids, s’est montré bon à la cape, mauvais à la banderille, c’est à dire ne répondant pas à l’appel et bien à la muleta. Le bétail de Hernan était plus fort que celui de Banuelos. En somme, toros réguliers.

(José) Bento de Araujo magnifique et excellent écuyer, s’est fait applaudir au second toro; bête vive et alerte, telle qu’il la fallait pour ce jeu spécial; son premier toro, en revanche n’a pu faire valoir les qualités du vaillant rejoneador.

Pepe-Hillo est un vrai matador doublé d’un bon torero. Les largas faites au premier toro étaient gracieuses, les véroniques avec lesquelles il a reçu le dernier toro étaient faites avec art en usant des bras seulement et d’une flexion de la partie supérieure du corps, les pieds immobiles, ce qui fait çe mérite et le style de ces belles passes. Les navarraises à ce même toro étaient vives et brillantes. Si nous jugeons ses banderilles, nous dirons qu’il est vraiment dommage qu’on ne les ait pas appréciées à leur juste valeur; en Espagne, deux paires comme celles qu’il a piquées, auraient  soulevé une explosion d’enthousiasme. Au sesgo! Une des plus difficiles et des plus dangereuses suertes de banderilles; nous expliquons plus haut pourquoi. Mais où Pepe-Hillo est supérieur, c’est dans sa façon de se placer pour l’estocade. À une longueur d’épée, bien profilé sur la corne droite, il attaque dans toutes les règles et porte des coups heureux. Se arranca en corto et por la derecha, disait certain aficionado que je connais bien. L’estocade signalée au sixième toro, portée haut la main, al encuentro, c’est-à-dire en citant le toro et en allant sur lui, est du plus grand mérite. Il est malheureux pour ceux qui aiment voir un toro bien tué qu’il n’ait eu qu’une banderille en main à ce moment-là!

Gonzalito est un intelligent peon (homme à pied) en même temps qu’un torero achevé. Très bien aux banderilles. Il a vivement cape le quatrième toro et s’est attire des applaudissements mérités. Luis bien aux banderilles.

Quelle note triste donnait ce toril avec ces gradins vides, ces places qui semblent infiltrer au Coeur de ceux qui croient s’y reposer, la passion taurine dans ce qu’elle a de plus pittoresque!

Nous ne reviendrons pas sur toutes les critiques qui ont été faites par nos confrères; M. Fayot, qui est désireux de plaire au public nimois a déjà opéré toutes les réformes que l’expérience d’une première course lui a suggérées.

Le spectacle qui avait manqué d’unité et qui n’avait présenté qu’une série de hors d’oeuvres, va devenir ce qu’il doit toujours être: une course dans laquelle ne paraîtront que le caballero en plaza, la cuadrilla et les picadores, la vraie corrida enfin!

Les pegadores qui avaient jeté la note triste et grotesque sont suprrimés et remplacés par deux picadors qui ont déjà fait leurs preuves en Espagne, l’un d’eux Manuel Gonzalez (Baulero) a combattu dans la cuadrilla de Lagartijo.

Les aficionados pourront retrouver leurs anciennes places sur les gradins du podium, le prix ainsi que celui de l’amphithéatre ayant été abaissé dans de sensibles proportions, 1 fr. 50 pour l’entrée, 2 fr. 50 pour les troisièmes ou toril.

Nul doute qu’avec ces modifications et un peu de décoration, notre vieil amphithéatre ne reprenne son air de fête qui fait en partie le charme des grandes courses.

MANUELITO

In LA CHRONIQUE MONDAINE, LITTÉRAIRE ET ARTISTIQUE, Nîmes – 6 de Maio de 1893