PLAZA DE TOROS
Nous voici enfin dans la phase brillante de la saison tauromachique, les courses prennent de plus en plus leur couleur et leur caractère espagnol et la ville de Nimes, à chaque Corrida de muerte, se trouve transformée comme aux jours de fête.
Tout promet pour demain une corrida superbe. Les taureaux, que nous avons eu le plaisir de voir rue Henri IV, et qui proviennent de la ganaderia de Exmo señor don Henrique de Salamanca, nous ont paru beaux, bien armés, très ramassés sur leurs jambes nerveuses et en état de fournir une belle course.
Les deux matadors qui doivent les combattre ne sont jamais venus dans notre plaza, mais ils nous arrivent précédés d'une réputation très méritée.
Un de nos confrères espagnols nous apprend que, le 29 juin dernier, à la course donnée à Ségovie, El Gallo, le matador qui vient remplacer Fabrillo blessé a été très applaudi dans ses passes de muleta et ses coups d'épée ; sur la demande des spectateurs, l'oreille du deuxième taureau lui a été accordée.
Le lendemain, 30 juin, à Burgos, il combattait avec Cara-Ancha six toros de la comtesse de Patilla, dans cette course 14 chevaux restèrent dans l'arène.
El Gallo fut très applaudi à l'épée et à la muleta. Mais il excelle dans les passes de manteau à genoux et en posant ses banderilles de pied ferme il sait toujours se faire acclamer.
Bonarillo, qui doit combattre à ses côtés, est un jeune diestro pour lequel la valeur n'a pas attendu le nombre des années ; c'est de tous les jeunes maestros celui qui jouit en Espagne de la plus grande réputation.
Dans une de ses dernières courses, combattant avec Mazzantini et Lagartijillo, il a porté les deux meilleurs coups d'épée de la journée, qui lui ont valu de la part du public une grande ovation.
Deux taureaux sont aussi réservés pour les rejonaderos (NOTA : rejoneadores). L'un combattu par Mlle Maria Gentis, la célèbre caballera en plaza qui fit courir tout Paris à la rue Pergolèse ; l'autre sera piqué par notre sympathique caballero, (José) Bento de Araujo, qui par son élégance et son habileté sait toujours provoquer l'enthousiasme.
Avec tels éléments, nul doute que le course de demain ne
soit réussie en tous points.
In LA CHRONIQUE MONDAINE, LITTÉRAIRE & ARTISTIQUE, Nimes - 8 de Julho de 1893